Le camino de las Escaleretas permettait aux habitants de Lecina d’accéder aux vergers situés tout proches de l’ermitage de San Martín au bord du Rio Vero en période d’inondation. Une superbe randonnée en boucle dans le cadre magnifique du Parc Naturel de la Sierra et des Canyons de Guara.
La Sierra de Guara est un de nos jardins ! En effet, à 2 heures de route de la maison, nous y allons plusieurs fois par an. Cela fait longtemps que Pierre du gîte Meson de Castellazo me parle de ce fameux chemin utilisé dans les temps anciens par les habitants de Lecina et connu sous le nom de « Camino de las Escaleretas ».
Nous voici donc en sa compagnie au départ de cette randonnée. Du parking du célèbre Rio Vero, nous descendons de quelques mètres jusqu’au bord de la rivière, puis nous passons sur le petit pont qui enjambe le Rio, pour poursuivre sur le sentier de l’autre rive. Après une courte montée, un panneau nous indique la direction de l’Ermita de San Martín. Nous descendons vers le moulin par un excellent sentier
Nous passons devant l’ancien moulin de Lecina aujourd’hui en ruines et en parti envahi par la végétation. Ce moulin a été utilisé également pour de la production d’électricité.
Nous continuons à descendre le long du río Vero. Le paysage est grandiose. Après plusieurs gués successifs, nous arrivons à l’ermitage de San Martín.
L’ermitage de San Martín de Lecina
Dans cet ermitage solitaire, situé au fond du barranco de la Choca et abrité par une imposante falaise calcaire, le temps semble s’être arrêté. D’origine romane, il a une seule nef. Il a été rénové au début du XVIIe siècle puis en 1706, un superbe pavage en galets a été réalisé. Il est encore superbement conservé. Des vergers étaient cultivés autour de l’ermitage et des céréales (blé, orge, maïs) étaient plantées en petites parcelles. Des traces d’anciens canaux d’irrigation sont encore visibles.
Le camino de Las Escaleretas par Pierre Minvielle
En 1966, Pierre Minvieille explore le rio Vero. Basé proche de l’ermitage de San Martín de Lecina il nous livre ce récit :
Dans ce bas-fond perdu du Barranco de Lecina, les visites ne tardèrent pas à se succéder. La plus marquante fut celle d’un vieil homme – nous avons appris par la suite qu’il s’agissait du señor Coscojuelo, « vecino» d’Asque et qu’il était propriétaire du champ sur lequel nous campions sans autorisation. Il a eu l’élégance de ne rien nous en dire. L’homme, trapu, devait avoir une soixantaine d’années. Il avait enlevé ses « alpargatas » pour les économiser lors de la traversée du rio. D’où venait-il ? De Barbastro, en camion, puis à pied ? Où allait-il ? D’un geste, il désigna le Peñon de la Choca.
« J’ai un champ de pommes de terre au-dessus », expliqua-t-il.
« Et par où passez-vous ? » ai-je demandé.
« Par là », a-t-il indiqué du geste, montrant toujours la falaise verticale du Peñon. « Il y a un passage ». Comme nous restions interloqués, voire dubitatifs, il crut bon, d’ajouter : « Je crierai à chaque passage ». Et il s’est éloigné. Nous l’avons vu se rechausser et attaquer l’ascension de la falaise. Au début, on devinait qu’il devait suivre une sente dans les éboulis, puis une corniche. Il trottait parmi ces difficultés. À chaque point stratégique, il poussait un hurlement pour indiquer l’emplacement de l’obstacle et la façon dont il fallait s’y prendre pour le surmonter. Les méandres de la garganta multipliaient les échos de ce cri comme pour accentuer la sauvagerie de la scène. Entre deux grottes, le funanbule embrassa la paroi et enjamba le vide. Le spectacle était si poignant que j’avais oublié de prendre ma caméra. Je me précipitais, l’a mis en batterie, visais la paroi et l’énergumène qui y circulait. À présent, il trottait sur une corniche en devers et disparut derrière un repli de la roche. Je le retrouvais plus loin, agrippé à un éperon. Il était un peu à quatre pattes. Il passa. Il hurla. Il disparut. Avais-je rêvé ? La brève séquence de mon film prouva que non. Étais-je en 1966 ou à l’époque de Neandertal ? Je ne saurai trop le dire. Et ce soir, il lui faudrait redescendre, encombré et alourdi par un sac de pommes de terre…
Nous revenons sur nos pas pour trouver le départ du sentier bien indiqué. Lorsque nous regardons la falaise, ce chemin (aujourd’hui réhabilité et équipé de mains courantes) est très difficile à distinguer. Il se déroule sur environ 300 mètres de dénivelé et passe par les grottes de Gallinero. La partie basse est (trop) bien aménagée; un véritable escalier.
Plus nous montons et plus la vue sur le Vero est belle. Nous ne tardons pas à arriver aux grottes de Gallinero, dont l’accès est aménagé et sécurisé, où se trouvent des peintures rupestres de style levantin.
L’art rupestre du Parc Culturel du Vero
Le Parc du Río Vero, avec plus de 60 grottes répertoriées, représente l’un des ensembles les plus singuliers d’art pariétal préhistorique d’Europe. L’art rupestre du Parc Culturel du Vero, a été déclaré par l’UNESCO, Patrimoine de l’Humanité.
Aux grottes de Gallinero les nombreuses peintures font partie de l’art Levantin. Cet art naturaliste et narratif, réalisé dans des grottes ou des abris exposés à la lumière, s’étend sur tout le bassin méditerranéen de la Péninsule Ibérique. Des représentations avec une forte présence humaine (scènes de chasse, danses, récoltes, combats… ) nous confirment la présence de civilisations allant du post-paléolithique jusqu’au Néolithique.
La suite est la partie la plus intéressante et la plus belle de l’itinéraire.
ATTENTION : La verticalité de ce chemin, des corniches exposées et aériennes, des passages sérieux non sécurisés (nécessitants de poser une corde d’assurance), réservent son parcours à des personnes habitués à progresser en montagne et à utiliser le matériel adéquat.
Les dernières difficultés passées, nous arrivons sur le haut du plateau sur le sentier joignant Lecina aux grottes de Barfaluy. Nous le suivons jusqu’au village, puis nous revenons au parking du Vero par l’ancien sentier du moulin. Merci Pierre pour cette superbe randonnée.
Informations pratiques
Situation: Espagne / Aragon / Sierra de Guara
Accès: Départ du parking du Rio Vero
Date: 13 avril 2019
Dénivelé: Environ 300 mètres
Itinéraire: Boucle
Horaire: 2 à 3 H
Carte: Sierra y cañones de Guara
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Notre coup de cœur hébergement
Le village de Castellazo, à 2 km d’Arcusa en Sierra de Guara, se trouve entre les deux cités médiévales d’ Ainsa (au Nord) et d’Alquezar (au Sud), et à 15 minutes du départ du Rio Vero.
A la porte du Parc Naturel de la Sierra de Guara et ses canyons, l’hébergement gîte Meson de Castellazo jouit d’un panorama exceptionnel et d’un emplacement privilégié.
Ancienne ferme typique du Sobrarbe, située à l’entrée du village, cet hébergement vous offrira le calme et le dépaysement dont vous avez besoin.
En route pour partager des moments de détente et de convivialité avec Marjorie, Pierre et toute l’équipe du gîte Meson de Castellazo.
Bonjour, effectivement, ce chemin et une petite merveille autant vertigineux que beau, ce parcours sur les flans du canyon fait découvrir des belvédères uniques sur le rio vero. Reste a chercher un peu le départ de cette vire dans le fond du canyon. j’y suis allé l’année dernière avec mon ami pierre qui cherche toujours à me faire découvrir les sentiers cachés de la sierra de Guara. Pierre de la meson de castellazo que je recommande vivement bien sur !! Du coup je me suis procuré aussitôt le livre « rio vero » de « Pierre Minvielle », qui retrace ces lieux secrets de la sierra de Guara, indispensable pour les passionnés du haut Aragon.
Effectivement, Pierre est incontestablement LE guide de cette partie de la Sierra puisqu’il connait ses moindres recoins et tous ses secrets.
Superbes photos…..BRAVO. Au plaisir de partager une autre rando ensemble sous le soleil d’Aragon.
Depuis des siècles les cuchacheros, les charbonniers et les paysans de Lecina, passaient par là. Et, après Pierre Minvielle et les siens, de nombreux randonneurs. Fallait -il équiper cet itinéraire? Que restera-t-il alors du Rio Véro quand nous l’aurons harnaché de passerelles (avec un sens unique !) comme à Alquezar? Faudra-t-il flécher les parcours dans les chaos et mettre des mains-courantes dans les fajas? Créer de nouvelles entrées pour éviter les navettes? Transformer la moindre falaise en via ferrata? Puis multiplier les interdits et les règlements? Rendre obligatoire la présence d’un guide? Faire payer les parkings? La sierra de Guara était un espace de liberté. Polluée, incendiée, dénaturée et suréquipée, vendue sur catalogue, elle est désormais devenue un produit commercial. Très bonne illustration ici.